Femmes
de l’ombre
: Tin-Hinan, reine des Touaregs
Jacqueline Sorel
(avec la collaboration de Simonne Pierron) site RFI(MFI)
En 1925, à Abalessa,
ancienne capitale du Hoggar, des archéologues ont découvert une
sépulture où se trouvait un squelette de femme bien conservé,
ainsi qu’un mobilier funéraire, des bijoux en or et en argent et
des pièces de monnaie à l’effigie de l’empereur romain
Constantin. Ils définirent cette tombe, datée du IVe ou du Ve siècle,
comme étant celle de Tin-Hinan, l’ancêtre des Touaregs. La
découverte a fait rêver bien des chercheurs et des écrivains.
Nous essayerons, sur leurs traces, d’évoquer cette figure de femme
que les Touaregs nomment « Notre mère à tous ».
Découverte
de Tin Hinan 1925
Tin-Hinan, cette femme énigmatique, dont l’existence
nous a été révélée par la tradition
orale et dont le nom voudrait dire « celle qui vient de loin » ou « celle
qui se déplace », aurait été la mère
fondatrice du peuple touareg. A travers les récits et les
chants véhiculés par ses descendants, les hommes du
désert, on peut retrouver son image : « Une femme irrésistiblement
belle, grande, au visage sans défaut, au teint clair, aux
yeux immenses et ardents, au nez fin, l’ensemble évoquant à la
fois la beauté et l’autorité ».
Lorsqu’elle est arrivée dans le Hoggar, « elle
venait de loin », indique son nom. Les chercheurs ont localisé cette
origine chez les Bérâbers (Berbères) du Tafilalet,
une contrée présaharienne du sud marocain qui devait être
plus verdoyante qu’aujourd’hui.
Pourquoi quitta-t-elle ces lieux ? Personne ne peut le dire. Alors
rêvons un peu et regardons la situation de la région
au cours de ces années lointaines. Au IVe siècle, le
nord de l’Afrique, et en particulier la Numidie, est dominé par
la puissance romaine qui a adopté la religion chrétienne à laquelle
s’est converti l’empereur Constantin. Cette Numidie,
dont le nom pourrait venir de nomade, est alors le théâtre
de révoltes contre le pouvoir romain. Diverses tribus circulent
entre la côte méditerranéenne et les régions
plus au sud, colportant non seulement des produits divers mais aussi
des informations. Quelques membres de la tribu marocaine des Bérâbers,
avec Tin-Hinan, ont-ils quitté la région pour des raisons
de conviction ou de politique ? Première hypothèse.
Autre hypothèse : un conflit personnel au sein de la famille
ou de la tribu qui aurait incité Tin-Hinan à fuir loin
de son milieu d’origine. Une femme intelligente, une femme
d’autorité qui prend la décision de partir...
pourquoi pas ?
Tumulus
- Sépulture de Tin Hinan 1925
Deux femmes dans le désert
Ce que l’on sait, grâce à la tradition orale rapportée
par le Père de Foucault qui l’a recueillie dans le Hoggar,
c’est qu’elle ne fut pas seule à faire le trajet
mais qu’elle se rendit dans ce haut massif du Sahara algérien
en compagnie d’une servante nommée Takamat. Ces deux
femmes étaient-elle accompagnées d’hommes pour
ce voyage aventureux ? Rien ne le dit mais c’est vraisemblable.
Traverser le Sahara était une aventure périlleuse,
même si ce désert brûlant, dont le nom en arabe
signifie le Fauve, connaissait un climat moins aride qu’aujourd’hui.
Les vallées, les plaines, les squelettes de rivières,
témoignent qu’une réelle végétation
existait autrefois, tandis que les peintures rupestres indiquent
que des chevaux y circulaient et que les chasseurs y trouvaient du
gibier.
Imaginons ces deux femmes effectuant leur trajet à travers
le désert. Sans doute ont-elles une monture : dromadaire,
cheval, âne ( ?) qui leur permet d’éviter de trop
grandes fatigues et quelques bêtes comme des moutons et des
chèvres qui leur offrent le lait et la nourriture dont elles
ont besoin. Comment auraient-elles pu survivre sinon ? On sait que
le chameau a fait son apparition en Afrique au IIe siècle,
venant de Libye, et que sa résistance permettant de longues
marches a transformé la vie des nomades. Dans le Tafilalet
et notamment à Sijilmasa, grand lieu de rencontres commerciales,
les caravanes chamelières faisaient halte. Bien que les Touaregs
disent n’avoir connu le chameau qu’après leur
arrivée dans le Hoggar, il est possible que pour ce voyage,
Tin-Hinan ait utilisé un de ces vaisseaux du désert
dont le pas lent et sûr inspire confiance et qui reste encore
de nos jours pour les Touaregs, leur moyen de transport favori, leur
monnaie d’échange, l’insigne de leur richesse.
«
J’ai pris ma longe et ma cravache au cuir tanné et, voulant fuir ce lieu avant la fin du jour, j’ai
saisi mon chameau.
Jusqu'à ce que s’apaise le vent d’après
l’orage, il avait pâturé en un lieu agréable
où l’herbe
d’emshéken était entremêlée
de pousses d’ämämmän. J’ai attaché ma selle ornée d’embouts de
cuivre, qu’a fabriqué pour moi un artisan habile, douce
pour la monture et pour le méhariste... » (poème
touareg).
Tin-Hinan consulte le ciel
On trouve, dans les peintures rupestres du Sahara, la trace d’une « route
des chars » très ancienne, dont le trajet permet de
trouver des mares, des puisards ou des oueds. La petite cohorte de
Tin-Hinan a dû l’emprunter pour se procurer cette denrée
rare, l’eau, dont un proverbe dit : aman iman, « l’eau,
c’est l’âme ». Les voilà donc suivant
ce tracé. Les jours passent, lentement. Parfois, la petite
troupe aperçoit quelques nomades, pillards possibles, qu’elle évite
soigneusement. Les heures de la journée sont chaudes et les
voyageurs du désert qui subissent la brûlure du ciel
accueillent la nuit avec soulagement. La pause du soir est bienvenue,
surtout si elle se situe près d’un point d’eau
et d’un pâturage. Les outres se remplissent et les bêtes
se régalent. Il faut faire vite car l’obscurité tombe
d’un seul coup. Tin-Hinan connaît les principales étoiles,
elle consulte le ciel pour trouver sa future direction. On dresse
une tente faite de peaux de chèvres tendues sur des arceaux.
Le repas est frugal : une bouillie de farine mélangée
au lait que l’on vient de traire.
Un jour, enfin, le sable s’estompe et la roche granitique,
surmontée de crêtes et de pitons, apparaît. Il
faut contourner les montagnes, se faufiler dans les vallées,
trouver les trous qui ont conservé l’eau de pluie, et
surtout faire manger les animaux. Région magnifique, mais
aride et difficile. Pourtant, c’est là que Tin-Hinan
s’installe. L’oasis d’Abessala, près de
Tamanrasset, lui offre l’hospitalité de ses eaux et
de ses pâturages. Y rencontra-t-elle d’autres habitants
? D’après Henri Lhote, qui a écrit de nombreux
ouvrages sur l’Ahaggar (Hoggar), le pays aurait connu une population
nombreuse, attestée par les palmeraies de Silet et d’Ennedid
et des puits creusés avant l’arrivée de Tin-Hinan.
Cette population noire, les Isebeten, ayant presqu’entièrement
disparu, Tin-Hinan n’aurait pas eu besoin de se battre pour
conquérir ces lieux devenus inhabités.
Que se passa-t-il dans les années qui suivirent cette installation
dans le Hoggar ? Qui fut le père des enfants de Tin-Hinan
? Un compagnon venu avec elle du Tafilalet ? Un noble voyageur originaire
de Libye ou d’Egypte ? Ou simplement un survivant de ces habitants
qui occupaient les lieux précédemment ? Le nom de ce « père » n’est
pas resté dans les récits véhiculés par
la tradition. Mais, chez les Touaregs, la femme jouit d’un
statut privilégié et le matriarcat est de règle,
ainsi donc, n’est retenue que la descendance féminine.
« L’antimoine
enténèbre ses paupières sombres »
D’après la légende, Tin-Hinan aurait eu trois
filles : Tinert, l’antilope, ancêtre des Inemba ; Tahenkot,
la gazelle, ancêtre des Kel Rela ; Tamérouelt, la hase,
ancêtre des Iboglân.
De son côté Takama, la servante, aurait eu deux filles
qui reçurent en cadeau de Tin-Hinan les palmeraies de la région
que possèdent toujours leurs descendants.
Les voilà donc installés dans l’oasis d’Abalessa.
Les tentes blanches se dressent dans ce paysage dominé par
le haut massif de l’Atakor. La beauté des paysages,
le silence de la nuit, le vent dans les montagnes n’a pu qu’inspirer
ces nouveaux venus dans la région. Le tobol (tambour) et l’amzad
(violon monocorde) étaient-ils déjà présents à l’époque
de Tin-Hinan ? On peut imaginer que cette femme de caractère
avait aussi le goût de la musique et de la poésie, tout
comme ses descendants et, qu’autour du feu, les habitants du
campement montraient leurs dons en ces matières.
Chantez, choristes, chantez pour les jeunes gens !
l’antimoine enténèbre ses paupières déjà si
sombres, elle a rehaussé ses sourcils,
elle a orné ses joues de taches claires, pareilles aux Pleïades
Gaïsha, la chanteuse, que se passe-t-il ?
Frappe des mains plus ardemment, frappe le tambourin ! (poésie
touarègue)
Tin-Hinan est l’amenokal (possesseur du pays), la reine de
ce petit peuple en voie de création. Est-elle, comme le raconte
une légende, à l’origine d’une ancienne écriture
touarègue, le tifinagh, que l’on a trouvée ici
et là gravée sur des pierres ? Ces signes, composés
de bâtons (des jambes d’animaux ?) et d’ idéogrammes
ronds (visages, soleil, astres ?) servirent-ils de repères
pour marquer les routes du désert ? Le mystère n’est
pas élucidé.
Si l’on en juge par les découvertes faites au début
du XXe siècle, les nouveaux arrivants auraient trouvé à Abelassa
un fortin témoignant d’une occupation militaire romaine
avec un certain nombre de pièces ayant servi de chambres et
de magasins. C’est dans une de ces cavités que Tin-Hinan
sera plus tard enterrée et que la mission conduite par M.
Reygasse, directeur du musée du Bardo à Alger, la découvrira
en 1925.
De Tin-Hinan à la troublante Antinéa
D’après sa description, elle reposait sur un lit sculpté et
portait des bracelets d’or et d’argent. A proximité des
chevilles, du cou et de la ceinture, s’éparpillaient
des perles en cornaline, agate et amazonite. Une écuelle de
bois portait la trace d’une pièce à l’effigie
de l’empereur Constantin. Ces objets ainsi que le mobilier
témoignent des relations qui ont pu se nouer entre les habitants
de l’oasis et les voyageurs venus de l’Orient. Tin-Hinan
a donc été capable, non seulement de faire ce voyage à travers
le Sahara mais aussi de créer les conditions de vie dans les
lieux et de nouer des relations commerciales nécessaires à l’enrichissement
du peuple né de sa descendance.
Les Touaregs de l’Ahaggar ont donc naturellement conservé le
souvenir de cette femme remarquable, et leurs récits, recueillis
par le père de Foucault qui vécut en ermite à Tamanrasset
au début du XXe siècle, inspira le romancier français
Pierre Benoît qui, dans L’Atlantide publié en
1920, met en scène un jeune militaire rencontrant Antinea,
une femme énigmatique qui règne sur le Hoggar. « Antinéa
! Chaque fois que je l’ai revue, je me suis demandé si
je l’avais bien regardée alors, troublé comme
je l’étais, tellement, chaque fois, je la trouvais plus
belle.... Le klaft égyptien descendait sur ses abondantes
boucles bleues à force d’être noires. Les deux
pointes de la lourde étoffe dorée atteignaient les
frêles hanches. Autour du petit front bombé et têtu,
l’uraeus d’or s’enroulait, aux yeux d’émeraude,
dardant au-dessus de la tête de la jeune femme sa double langue
de rubis. Elle avait une tunique de voile noir glacé d’or,
très légère, très ample, resserrée à peine
par une écharpe de mousseline blanche, brodée d’iris
en perles noires. Tel était le costume d’Antinéa... »
L’imaginaire de Pierre Benoît nous conduit loin de la
réalité et, pour retrouver l’ancêtre des
Touaregs, il est préférable de lire des ouvrages scientifiques
modernes, mais dans ceux-ci la trace de Tin-Hinan est bien mince.
Tin-Hinan reste donc une reine de légende qui préfigure
la femme moderne, capable de créer la vie et de gérer
le bien public. C’est ainsi que les Touaregs nous ont transmis
son image. C’est ainsi que nous avons tenté de la faire
revivre.
Tin Hina - Antinea
Extrait de « Le mystère du Sahara et des hommes bleus » d’Elizabeth
Kalta
Tin Hinan est la reine dont Pierre Benoît modifiera le nom
pour les besoins de son roman "L'Atlantide" en le restituant
en Antinéa. en 1918, date de la sortie de son livre, Pierre
Benoît se fondait sur des traditions sahariennes pour donner
vie à son héroîne.
Tout ce que l'on savait sur cette mystérieuse défunte
se résumait à ce qu'avait recueilli un officier français,
Léon Lehuraux, qui avait vécu de longues années
au Sahara. Selon la légende, à une date indéterminée,
Tin-Hinan serait venue du pays des Berabers, avec sa fidèle
suivante Takamat et un certain nombre d'esclaves, pour se rendre
au Hoggar. Elle était montée sur une superbe chamelle
blanche et avait emporté de nombreuses charges de dattes et
de miel. Mais la route était longue jusqu'au Hoggar.
Après des jours et des jours de marche, ses provisions de
bouche commençaient â s'épuiser et nulle oasis
n'apparaissait à l'horizon. Aux dunes succédaient d'autres
dunes, et aux rochers, d'autres rochers. Au point que la caravane
en était menacée dans son existence.
Un soir, cependant, alors que Takamat faisait accroupir son méhari
(dromadaire) devant un petit monticule de sable, elle vit ce sable
bouger. Elle se pencha, fébrile, creusa légèrement
et découvrit une termitière, oùs les insectes
avaient emmagasiné du grain. Aidée des esclaves noirs,
Takamat ramassa la précieuse manne, et alla l'offrir à Tin-
Hinan, qui était restée sur son méhari comme
doivent le faire les femmes nobles. Cette provision inattendue permit à la
caravane de continuer sa route et d'atteindre le Hoggar dans de bonnes
conditions. Cependant, en reconnaissance de ce bienfait, Tin-Hinan
décida de fonder à cet endroit les bases de son nouveau
royaume. C'est de sa lignée que naquit la race des Touaregs.
Et c'est en souvenir de cet épisode que les tribus vassales
des Dag Rali et des Kel Ahnet, descendantes de Takamat, payèrent
annuellement la «tioussé» aux tribus nobles des
descendants de Tin-Hinan. A la mort de cette reine, chaque Targui
qui passait à hauteur de son tombeau y déposait une
pierre en signe de dévotion. Peu à peu, s'éleva
un monument de rocailles, haut de 30 mètres et jamais achevé,
au sud-ouest de Tamanrasset.
La sépulture de Tin Hinan
L'expédition dans le Hoggar fut donc prête en 1925.
Cette fois, Prorok s'était attaché un homme de, renom,
Maurice Reygasse, qui était alors directeur du Musée
de préhistoire et d'ethnographie du Bardo, à Alger.
Parvenu en vue d'Abalessa, il fallut non seulement convaincre les
Touaregs de permettre qu'une armée de manœuvres s'attaque
au formidable tumulus funéraire de Tin-Hinan, mais également
déterminer avec précision sous quel angle il convenait
de s'y employer. En effet, il se présentait sous la forme
d'un «redjem», soit un monstrueux tas de cailloux. De
plan sensiblement circulaire, son diamètre atteignait environ
25 mètres. En revanche, sa hauteur ne dépassait guère
4 mètres...
Un formidable coup de chance permit à Prorok de découvrir
assez rapidement plusieurs salles remplies de terre et de décombres.
Après les avoir fiait vider et percer, il déboucha
sur une autre salle, guère plus grande que les précédentes.
Mais cette fois, une surprise l'attendait...
Dans la pénombre, il distingua un squelette, environné d'une
multitude d'objets. La tête de la morte était coiffée
de plumes d'autruche. Le corps était couché sur le
dos, orienté vers l'est, les jambes et les bras légèrement
repliés. Sans nul doute avait-il été déposé sur
un lit funèbre; ainsi qu'en témoignaient les débris
de cuir et de bois, dont le soi était jonché. Le squelette était
encore vêtu d'une robe de cuir et ses bras garnis de magnifiques
et lourds bracelets d'or et d'argent. Pêle-mêle, sur
le sol, on pouvait voir des éléments de parure, les
grains d'un collier fait de perles de chalcédoine et de perles
rouges, des fragments de verre, une petite statuette stylisée
en plâtre poli et une écuelle de bois contenant des
empreintes de monnaies romaines. Pour Prorok et Reygasse, il n'y
avait plus de doute : ce squelette était celui de tinHinan,
la reine mythique des Touaregs !
A l'examen, ce corps s'avéra bien être celui d'une femme,
de race blanche et de grande taille -entre 1,70 et 1,75 m avec un
thorax large, un bassin étroit et des jambes fines. Ce qui
frappa plus particulièrement les archéologues en présence,
ce fut l'existence parmi ce « mobilier » funéraire
d'une statuette représentant une femme stéatopyge,
d'un type que les préhistoriens appellent aurignacien, ce
qui nous ferait remonter à peu près à l'époque
où un cataclysme mit fin à l'hégémonie
des Atlantes... Fort et fier de sa découverte, Prorok alla
promener sa trouvaille jusqu'à New York. Et dans son irrévérence,
nomma l'infortunée Tin-Hinan «l'Eve du Sahara».
Enfin, au terme de ce périple tapageur, elle entra solennellement
au Musée d'éthnographie du Bardo, à Alger, et
fut confiée aux bons soins de son co-découvreur Reygasse.
Hélas, les hommes de science ne furent pas plus respectueux
de cette relique. Remise entre les mains des praticiens de la Faculté de
médecine d'Alger, elle dut subir toutes les avanies d'un squelette
pour salle d'anatomie. Bardée de de fer, munie d'un clou de
suspension, on la badigeonna sans vergogne de goudron. Au point que
pour rattraper cette bévue, il fallut l'immerger pendant plusieurs
mois dans un bain décapant.
Parla suite, elle gardera de cette mésaventure une étrange
et belle patine sombre. 
La légende d'In Salah
Dans sa longue quête d'une retraite, la Reine Tin Hinan s'était établi à In
Salah. A cette époque, Ben Azzi Salah, un noble voyageur venant
du Touat se fit offenser par elle :
- C'est contraire aux lois de l'hospitalité lui dit-il, comment
oses-tu refuser de l'eau à un voyageur en plein désert
?
- Mes chameaux risquent de ne pas pouvoir se désaltérer
lui répondit-elle d'une manière méprisante !
Ben Azzi pris de colère leva son bâton et le planta
dans le sol. Miraculeusement l'eau se mit à sourdre devant
la reine abasourdie par le prodige.
C'est, dit la légende, autour de cette source que la ville
fut construite. (Ain sallah, la source de Sallah)
Notons que les difficultés que rencontrent les habitants du
désert pour s'entendre, ont toujours eu pour principale cause
la rareté de l'eau.
De plus les Touareg nomades et autres nobles guerriers exécraient
les habitants des villes. La rivalité pour l'eau s'exprime
ici autour de deux ancêtres symboles. Tin Hinan avec sa force
militaire accusée d'égoïsme contraire aux règles
de l'hospitalité saharienne, est contrée par l'ancêtre
puisant sa force dans la sacralité et le savoir religieux,
créant un espace urbain qui prolonge la sainteté des
eaux vitales.
Telle pourrait être l'explication d'une répulsion séculaire
entre les Touareg et leur voisins sédentaires. (Rguibet et
Chaâmba en particulier)
Remarque : toutes les légendes font venir l'ancêtre
d'ailleurs. Il n'est jamais originaire du lieu dont il est question.
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