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Culture / Histoire / Société

Les Touaregs d'hier et d'aujourd'hui
Organisation sociale et politique



L'organisation politique du pays Touareg est faite de " confédérations " qui rassemblent chacune un nombre variable de tribus appartenant à tous les niveaux de la hiérarchie sociale.

La société touarègue est hiérarchisée avec, à sa tête, un chef suprême ("amenokal") qui appartient à une tribu noble. Le terme de tribu ("tawsit") désigne un groupe de familles portant un même nom collectif et se rattachant à un ancêtre commun.

Au sommet, les nobles-guerriers, les aristocrates ("imajeghen"). Les guerriers aristocrates, minoritaires, ont un rôle bien déterminé : conduire des " affaires " et faire la guerre. En position de dépendance, les vassaux, les tributaires ("imghad") qui participent aux guerres avec les nobles. On les appelle parfois Kel ulli, "ceux des chèvres" car ils seraient issus de populations spécialisées dans l'élevage des dromadaires et des chèvres.
A côté, "ceux de l'islam" ("ineslemen"), religieux à titre collectif, qui ne sont pas des guerriers même s'ils participent parfois à des combats; grâce à leur pouvoir spirituel ("imam") et juridique ("quadi"), ils soutiennent le pouvoir politique par leurs prières et leurs talismans; ils connaissent et enseignent l'arabe, prient pour la victoire, préparent des amulettes avant le combat.

Tous ces groupes appartiennent aux hommes libres ("ilellan") sans liens avec la classe servile.

Des tribus libres mais portant le nom collectif de métis ("ibogholliten") ont pour origine l'union d'une femme libre et d'un homme serf, ou l'inverse. Au bas de l'échelle sociale se situe la classe servile, aujourd'hui disparue sur le plan juridique, désignée par le nom d'"iklan", les anciens esclaves descendants de populations installées dans le pays avant l'arrivée des Touaregs et réduites par eux en esclavage. A l'intérieur du monde servile, il existe de nombreuses catégories: les affranchis ("iderfan") qui ont quitté le monde servile, libérés pour service rendu ou dans un geste pieux; les "irawelan", des groupes serfs vivant éloignés de leurs maîtres. Les enfants nés d'un couple de captifs dont le père et la mère appartenaient à des familles différentes restaient la propriété du maître de leur mère. Aujourd'hui tous les États ont supprimé l'esclavage et il ne reste que des serviteurs attachés à une famille : les femmes préparent les repas, cherchent l'eau et le bois, les hommes s'occupent des troupeaux.

Les artisans qui sont attachés aux tribus influentes et aux chefs travaillent le métal, le bois, et leurs femmes, le cuir: ils fabriquent des objets, les entretiennent et les réparent. On attribue à l'artisan un caractère menteur, lâche, rusé, sale. Pourtant, personne ne peut se passer du forgeron : il fabrique et répare les armes, les bijoux, le matériel de la vie nomade, pastorale et domestique. Il possède la maîtrise du feu. Il sait transformer la matière minérale, végétale ou animale. Son rôle dans la société dépasse sa seule compétence technique: il est non seulement le maître de la matière mais aussi le conservateur du patrimoine, l'homme des relations publiques et parfois l'homme de la parole (il peut dire ce qui est interdit aux autres). Il possède une liberté de comportement qui lui permet de mener à bien ses projets; c'est pourquoi on le charge de missions diplomatiques délicates ou de rôles d'intermédiaire (lors de demandes en mariage, par exemple). On naît artisan, forgeron, cordonnière, potière, on ne le devient pas. Les artisans, forgerons, bijoutiers, menuisiers dont les femmes sont dans le travail du cuir sont dispersés à travers tout le pays touareg, au service de tous. Ils sont installés dans le campement des principaux chefs ou parfois sur les marchés (Agadez, In Gall, Abalak).

Dans la culture touarègue, on ne s'allie pas hors de son groupe social ou même hors de sa propre tribu. Chacun doit rester à sa place, dans sa catégorie, dans sa tribu. A chaque catégorie sociale correspond une image de marque. Ainsi, tout homme doit se conformer à cette image et au rôle qui lui est donné sous peine d'exclusion sociale. Les guerriers et les aristocrates des grandes tribus nobles doivent se conformer à un idéal de courage, de beauté, de force virile. Le noble est partout à l'aise, se comportant en toute circonstance comme le maître du monde, comme si tout lui appartenait. Il peut saisir par la force le bien d'autrui de manière tout à fait licite. La noblesse de naissance doit s'accompagner de la noblesse de l'âme, du caractère, des manières. Mais le noble-guerrier doit manifester un courage, une force de caractère qui s'expriment essentiellement à la guerre; il doit continuellement se dépasser et sa vie est faite d'une suite d'exploits qui en font un héros dont le nom est connu d'un bout à l'autre du Sahara.

On peut donc résumer ainsi l'organisation sociale et politique des Touaregs:

- Les Imajeghen: tribus nobles
- Les Imrad: tribus vassales
- Les Ineslemen: tribus maraboutiques
- Les Iraouellan: anciens captifs touaregs
- Les Iklan: esclaves noirs de jadis
- Les Bellas: esclaves libérés de langue songhaï
- Les Bouzous: esclaves libérés de langue haoussa
- Les Inaden: forgerons noirs, caste libre et fermée.



Les confédérations touarègues dans tout le Sahara

Traditionnellement, il existe sept confédérations touarègues :

1. Ahaggar (Algérie, Niger)
2. Ajjer (Libye, Algérie)
3. Aïr (Niger)
4. Azawagh (Niger, Mali)
5. Adghagh (Mali)
6. Tadamakkat (Mali)
7. Oudalan (Burkina-Faso)

Les confédérations touarègues au Niger

Les Touaregs sont le quatrième groupe ethnique du Niger après les Haoussas, les Songhaïs et les Peuls. Associés aux nomades Peuls, ils représentent le quart de la population nigérienne. Les invasions venues du nord ont provoqué un brassage de populations noires et berbères favorables à cette intégration.

Au Niger, 4 grandes confédérations regroupent les tribus touarègues:

- Dans l'Aïr: les Kel Aïr
- Kel Ferouane (Iférouane), Kel Oui (Aïr), Kel Tafidet (nord-est de l'Aïr), Kel Azar (Illialan), Kel Negourou (Abardakh), Kel Taranawen (Bargot), Kel Farass (Tabelot), Kel Bagzan (Baguezane et Afassen), Kel Séloufiat (un peu partout).
- A l'ouest d'Agadez: les Loullimiden
- Entre Tahoua et Menaka (Mali): les Kel Gress
- Dans la boucle du Niger: les Touaregs du Fleuve

La famille touarègue

Les Touaregs sont monogames et la tente est le symbole de cette union. Se marier se dit "fabriquer la tente", "nouer la tente". Le jeune homme doit apporter à la famille de sa future épouse des animaux (chamelles ou vaches) dont la qualité et le nombre doivent être équivalents à ceux des animaux qu'a reçu la mère de la mariée. La tente, le mobilier et le matériel domestique sont fournis par la famille de la mariée; la tente constitue l'univers de la femme qui, en cas de divorce, s'en va avec elle et laisse son mari sans toit. Presque toujours les mariés appartiennent à la même catégorie sociale. "La queue reste là où elle est, elle suit toujours les pattes", dit un proverbe qui montre que les hiérarchies sociales suivent un ordre aussi immuable que celui de l'anatomie.

Les femmes touarègues sont souvent l'objet de chants d'amour et de poèmes qui sont des appels à l'absente ou des cris de désespoir pour celle qui se refuse. Les rapports amoureux, libres et codifiés en même temps, donnent l'occasion aux hommes et aux femmes d'exprimer leurs amours avec fougue. La beauté de certaines femmes éclipse tout. La beauté idéale est liée à l'ampleur des formes mais aussi à la douceur du visage. Les dents sont des perles d'un blanc éclatant, légèrement écartées, qui éclairent le visage. Les femmes ont le verbe haut et s'expriment à l'égale des hommes.

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